L'article est daté d'avril 2011
Le sunitinib multiplierait par 2 la durée de survie sans progression de la maladie
Le Pr Eric Raymond de l'hôpital Beaujon (Clichy, France) et son équipe ont recruté 171 patients présentant un cancer du pancréas avancé. Chacun ont reçu soit 37,5 mg par jour de sunitinib (Sutent
, laboratoires Pfizer) sous forme de gélules, soit un placebo (ni le médecin, ni le patient ne savait s'il était dans le groupe placebo ou le groupe
Sutent - principe du double aveugle). Le
sunitinib bloque la molécule VEGF, qui est un facteur de stimulation de l'angiogénèse (constitution de néovaisseaux sanguins destinés à alimenter la tumeur).
L'objectif principal de l'étude était de comparer la durée de survie sans aggravation notable de la maladie ("survie sans progression"), ainsi que le taux de réponse au médicament, la survie globale et la sécurité clinique du médicament.
Cette étude a dû être arrêtée prématurément en raison de l'évidente efficacité du médicament : 25 % des patients sous placebo étaient déjà décédés, contre "seulement" 10 % des patients sous sunitinib. Les données recueillies ont également montré que la durée moyenne de survie sans progression était de près d'1 an dans le groupe traité (11,4 mois), contre seulement 5,5 mois dans le groupe placebo. Ce médicament bloque une molécule particulière appelée mTOR, qui est impliquée à la fois dans la croissance des cellules cancéreuses et dans l'angiogénèse.
Près de 10 % des patients avaient une réponse clinique sous Sutent
, contre 0 % sous placebo. Les effets secondaires les plus fréquents n'ont pas été graves (diarrhée, nausées, vomissements et fatigue). Cependant 12 % des patients ont présenté une baisse des globules blancs (neutropénie), mais apparemment sans conséquences graves.
Ce médicament, déjà utilisé dans le traitement du cancer du rein, semble donc efficace pour retarder l'évolution péjorative du cancer du pancréas, et pourrait donc s'avérer utile, à condition que ses effets secondaires soient suffisamment maîtrisables pour permettre sa prise régulière et continue.
L
'Evérolimus permet aussi un allongement de la survie
Le cancérologue américain James Yao et son équipe ont testé une autre molécule habituellement utilisée dans le cancer du rein, l'Evérolimus (Afinitor
, des laboratoires Novartis). Pour tester l'efficacité de cette molécule, 410 patients en ont pris 10 mg par jour, sous forme de comprimés, ou un placebo (étude en double aveugle).
Les résultats sont étonnamment comparables à ceux obtenus avec le Sutent
: la médiane de survie sans progression était de 11 mois sous Afinitor
, contre 4,6 mois seulement sous placebo. A 18 mois, 34 % des patients sous Afinitor
étaient encore vivants sans avoir connu une progression de leur maladie, contre seulement 9 % de ceux qui prenaient un placebo.
Ce médicament a également entraîné la survenue d'effets indésirables, en particulier une stomatite avec des aphtes (64 % des patients traités), une éruption cutanée, de la diarrhée ou de la fatigue. Plus rarement une anémie et/ou une hyperglycémie sont survenues, sans conséquence suffisamment grave pour arrêter le traitement.
Ces deux médicaments semblent donc doubler, voire tripler à terme, les chances de survie sans progression du cancer du
. Certes, ces deux traitements comportent des effets secondaires, mais ils semblent contrôlables. Par ailleurs, le rapport bénéfice/risque est à considérer en regard de la gravité de la maladie sans traitement. On doit cependant attendre que ces résultats se confirment lors de nouvelles études cliniques à venir (en particulier en termes de survie globale). En fonction des résultats, le pronostic de cette maladie pourrait demain être considérablement amélioré.
Jean-Philippe Rivière
Sources :
- "Sunitinib Malate for the Treatment of Pancreatic Neuroendocrine Tumors", Raymond E et coll., New England Journal of Medicine, 10 février 2011, résumé accessible en ligne
- "Everolimus for Advanced Pancreatic Neuroendocrine Tumors", Tao J et coll., New England Journal of Medicine, 10 février 2011, résumé accessible en ligne
- "Two cancer drugs keep rare pancreatic tumors in check", USA Today, 10 février 2011, article accessible en ligne