Catherine Le Banner est prothésiste capillaire. Les têtes nues par la « chimio » défilent dans son salon. Des femmes devenues la cible d'un certain marché, que dénonce la coiffeuse guingampaise.
Reportage
Sur un rebord de placard, elles s'alignent. Des têtes coiffées de perruques. Non, pas « perruques », ça fait trop... festif. Dans son salon mixte, elle accueille des femmes qui vont perdre leurs cheveux. Conséquence visible du traitement contre le cancer. « Je suis à ma 14e prothèse capillaire posée depuis août. » Catherine Le Banner, la coiffeuse de la rue du Vally a des doigts de fée et surtout une envie d'aider les gens. Elle a été coiffeuse et perruquière pour homme il y a plus de dix ans à Plouha. Après une pause, elle a repris cette activité depuis moins d'un an à Guingamp.
Pas de cancans
« Quand j'ai un rendez-vous pour une perruque, je baisse les stores. Je reste 1 h 30 avec la personne », raconte Catherine Le Banner. Comme une coiffeuse normale, elle discute avec sa cliente. Pas de cancans, mais un échange humain et profond. « Après un rendez-vous comme ça, je suis lessivée. Mais je veux qu'elle reparte avec le sourire. »
Elle fait tout pour que ces femmes se sentent bien. « Je ne vends jamais de perruques, juste en disant aurevoir et merci. » Catherine passe du temps sur les têtes nues de ses clientes. Elle fait essayer des perruques, mais « elles ne sont pas comme il y a vingt ans ». Cela peut aller jusqu'à quatre ou cinq modèles. « Certaines essaient de retrouver ce qu'elles avaient avant. D'autres veulent changer radicalement de looks », dit-elle en sortant un carré blond d'une boîte. Après la pose, Catherine fait son travail de coiffeuse, ciseaux en main ! Comme pour les vrais cheveux, elle retravaille la coupe des prothèses capillaires.
Comment ont-elles trouvé Catherine ? Elle sourit timidement. « J'ai déposé des petites revues à l'hôpital et à la clinique radiologique. » La coiffeuse est aussi agréée par la sécurité sociale. La caisse rembourse 125 € sur la prothèse capillaire, certaines mutuelles le font aussi. Catherine a signé une charte avec la Ligue contre le cancer. Elle est donc répertoriée sur une liste de professionnels spécialisés.
Contre les profiteurs
Pour Catherine, cette charte avec la Ligue, c'est autre chose. « Je me suis engagée à ne pas profiter de la détresse psychologique des personnes. » Les cheveux de Catherine : entre 200 et 530 €. Cela dépend de la fabrication machine ou main de la prothèse. « Je me bats contre les salons qui vendent plein de produits à ces femmes, proteste-t-elle. Je connais des salons, comme à Perros-Guirec ou Erquy, qui n'hésitent pas à facturer une prothèse simple pour 800 € ! » Le double de son salon.
Un abus de faiblesse à ses yeux. Elle ne décolère pas. « Les malades sont déjà atteints psychologiquement et financièrement. » Et de parler du cas de cette femme aidée financièrement par l'antenne départementale de la Ligue contre le cancer. Elle touchait les minimas sociaux, à peine 850 € par mois. Le prothésiste n'a pas hésité à lui vendre une perruque à 800 €.
Son métier, elle ne l'a pas choisi. L'une de ses femmes aux têtes nues lui a demandé où elle l'avait appris. « Ce n'est pas mon métier, j'aime tout simplement aider les gens. »
Angélique GOYET