Netris-Pharma Des « leurres » contre le cancer Certaines cellules cancéreuses utilisent une molécule, dite ligand, pour
neutraliser des récepteurs chargés de provoquer leur mort en cas de
multiplication anarchique. Des chercheurs développent des molécules
leurres pour court-circuiter ce ligand.
C'est une toute jeune
start-up créée en juin 2008 par deux chercheurs CNRS lyonnais…
Comme parfois, la valeur n'attend pas le nombre des années, Netris-Pharma est
déjà courtisée par plusieurs grandes firmes pharmaceutiques ! Et pour
cause, cette société de biotechnologie planche sur une voie de
recherche prometteuse pour traiter notamment des cancers du sein
actuellement incurables : les cancers « métastatiques », qui se
développent à distance du lieu initialement affecté.
De quoi s'agit-il précisément ? D'une nouvelle thérapie reposant sur une
découverte inédite : les « récepteurs à dépendance », identifiés en
1998 par l'un des cofondateurs de Netris-Pharma, Patrick Mehlen,
directeur du laboratoire « Apoptose, cancer et développement »
1 au centre anticancéreux Léon Bérard de Lyon. «
Il s'agit, en fait, de molécules à la surface des cellules, précise Agnès Bernet, cofondatrice de la start-up et chercheuse dans le même laboratoire.
Normalement,
ces récepteurs entraînent la mort de toute cellule qui se multiplie de
façon anarchique. Mais dans le cas du cancer, les cellules cancéreuses
produisent, de façon autonome, des molécules appelées “ligands”, qui se
fixent sur ces “récepteurs à dépendance”, ce qui protège les cellules
tumorales de la mort. »
Selon une étude réalisée par les cofondateurs de Netris-Pharma sur des tissus prélevés chez des patientes, dans 60 % des cancers métastasiques du
, les cellules
tumorales fabriquent en quantité anormalement élevée un de ces ligands,
la Nétrine-1. «
Nous avons donc eu l'idée de développer des
molécules “leurres” capables de capter les ligands, les empêchant de se
fixer sur les récepteurs, ce qui permet d'induire de nouveau la mort de
la cellule cancéreuse », poursuit Agnès Bernet.
Ses collègues et elle ont déjà développé une première « molécule leurre » qui capte
le ligand Nétrine-1. Ils l'ont baptisée Anétrine-1. Mais d'autres
molécules sont déjà en préparation : les scientifiques espèrent en
effet en concevoir une quinzaine capables de capter les ligands des
autres récepteurs à dépendance découverts par le laboratoire. De quoi
obtenir toute une série de nouveaux traitements ciblés contre les
cellules tumorales ! «
Pour mener à bien ces études, nous
souhaitons collaborer très vite avec des firmes pharmaceutiques afin de
leur céder nos licences ; cela nous permettra de financer nos
recherches sur les autres couples récepteurs/ligands. Des contrats de
collaboration sont en cours avec plusieurs grandes firmes
pharmaceutiques et des investisseurs », explique Agnès Bernet.
La société espère se séparer de sa première licence à l'horizon 2010 pour un coût évalué à plus de 10 millions d'euros. «
Bien sûr, nous ne la céderons que si les conditions de collaboration nous satisfont, souligne Agnès Bernet. Sinon, nous recourrons à des
investisseurs pour mener nous-mêmes les premiers tests d'efficacité de
nos molécules leurres chez l'homme. » En attendant, Netris-Pharma
continue ses recherches grâce au financement de plus de 1 million
d'euros que la start-up a déjà obtenu sous forme de fonds privés de
sociétés et de fonds publics alloués par l'Agence nationale de la
recherche (ANR) ou le ministère de l'Enseignement supérieur et de la
Recherche.
Kheira Bettayeb